« Il faut travailler comme si on allait vivre cent ans, et s’amuser comme si on allait mourir demain. »
Il était l’un des chefs français les plus célèbres au monde, Paul Bocuse nous quittait il y a un an précisément, à l’âge de 91 ans. Figure de la gastronomie et du patrimoine français, il avait bâti un véritable empire. Paul Bocuse a dédié sa vie à la cuisine, et sa carrière fut consacrée par trois étoiles au Guide Michelin, restées accrochées à son uniforme durant plus de cinquante ans. Un record… Portrait de Monsieur Paul, en compagnie de l’un de ses disciples, Yannick Alléno.
« Comme on dit à Lyon, tous nos plats sont gourmands… Gourmands de crème, gourmands de beurre… » (Paul Bocuse)
Le Chef vous propose ce soir une soupe aux truffes, un loup en croute sauce Choron, et pour finir, une tarte au citron… Tous ces plats sont signés par celui que l’on surnomma « Le Cuisinier du Siècle », Monsieur Paul Bocuse. Originaire de la région lyonnaise, berceau de la gastronomie française, il porta haut l’étendard de la cuisine française. Un an après sa disparition, revenons sur la carrière de ce révolutionnaire culinaire.
« Paul Bocuse a joué un rôle social important pour tous les cuisiniers, dans la mesure où il leur a permis de sortir de leur cuisine. Ce qui était important à l’époque, on pense d’ailleurs à Louis de Funes dans « Le Grand Restaurant », c’était l’homme de la salle. Le cuisinier était quant à lui relégué dans l’ombre. » (Eve-Marie Zizza-Lalu, Auteur de « Paul Bocuse, le Feu Sacré », Ed. Glénat)
En 1973, Paul Bocuse, entouré des critiques gastronomiques Henri Gault et Christian Millau, veut moderniser l’art culinaire et lance « La Nouvelle Cuisine ». A l’époque, on avait toujours un peu la même manière de dresser, avec la sempiternelle peluche de persil au même endroit de l’assiette, sur le poisson ou sur la viande, et c’était la règle respectée scrupuleusement depuis des décennies.
Paul Bocuse casse les codes, et un vent de liberté commence à souffler sur la cuisine. On parle alors de « Nouvelle Cuisine » comme on parle de « Nouvelle Vague » au cinéma, la caméra à l’épaule… On a désormais une façon plus naturelle de présenter les plats.
« La plus grande qualité d’un cuisinier, c’est la sobriété. Et avec ça, on va très loin… » (Paul Bocuse)
« Paul Bocuse a su avant tout s’adapter au monde qui l’entourait. Il est parti dans un délire de Nouvelle Cuisine, et il s’est finalement aperçu qu’à Lyon, les clients ne voulaient pas forcément manger un petit pois, posé là sur le côté gauche de l’assiette. Il a donc allégé la cuisine bourgeoise. » (Yannick Alléno, Chef étoilé)
« Il s’est lancé dans ce travail de cuisine à l’assiette qui n’existait pas. Avant Paul Bocuse, on envoyait tout en plat. Il est le premier à construire une assiette, à être attentif à son équilibre et son harmonie. » (Alain Le Cossec, Meilleur Ouvrier de France et Enseignant à l’Institut Paul Bocuse)
En 1975, Paul Bocuse est fait Chevallier de la Légion d’Honneur par le Président Valéry Giscard d’Estaing. Spécialement pour cette cérémonie, il crée la fameuse soupe aux truffes « VGE ». Et Paul Bocuse s’est évidemment saisi de cette occasion pour en faire une redoutable opération marketing : « Le Chef d’aujourd’hui est un chef qui fait de la relation publique, qui va voir ses clients en salle, qui ne reste plus dans ses cuisines, qui regarde ce qui se passe ailleurs… » (Paul Bocuse)
« Paul Bocuse est quelqu’un qui a toujours accordé une grande importance à son image, et qui a travaillé dur pour que sa maison rayonne. Il connaissait parfaitement les tendances du moment. » (Yannick Alléno, Chef étoilé)
Et Dieu sait si Paul Bocuse rayonna, en France mais aussi partout dans le monde. Il acquit une dimension internationale, en partant faire la promotion de la gastronomie française sur tous les continents. De cette renommée mondiale acquise dans les années 70 et 80 naîtra l’Institut Paul Bocuse, situé à Ecully, près de Lyon, où des élèves de plus de cinquante nationalités différentes viennent y apprendre non seulement la méthode et le style Bocuse, mais aussi un savoir-être et un savoir-vivre à la Française.
Ainsi, alors que l’objectif premier était de faire rayonner la gastronomie française à l’étranger, grâce à Paul Bocuse, c’est l’étranger qui a commencé à venir en France. Il a permis de créer des flux dans les deux sens, et à ce que chaque pays commence à s’intéresser à son propre terroir et mettre en application l’enseignement de Bocuse afin de révéler ses propres racines. Paul Bocuse a partagé avec le monde une méthode, une vision…
« Il avait cette curiosité et surtout une envie énorme d’aider tous ces chefs. Quand il arrivait en cuisine, il serrait la main du plongeur comme du chef, et tout le monde l’appelait Monsieur Paul… C’était un rassembleur, toujours dans le partage. » (Alain Le Cossec, Meilleur Ouvrier de France et Enseignant à l’Institut Paul Bocuse)
« Il faut toujours mettre sa toque. C’est le chapeau que l’on n’enlève pas, même devant le Président de la République… » (Paul Bocuse)