Bourré de vitamines et autres drogues douces, le premier album du duo Papooz, formé par Ulysse Cottin et Armand Panicaut, risque de rester collé à votre mange-disques tout l’automne. On vous explique pourquoi dans notre interview.
Après une prestation remarquée au Printemps de Bourges, une Maroquinerie pleine à craquer en mai dernier et un clip signé Soko qui a fait le tour de la toile, le duo Papooz nous révèle enfin son premier album “Green Juice”. Au programme : des mélodies pop folk gorgées de soleil, des vitamines (Green Juice), des chinoiseries où l’on s’imagine descendant le Gange en fumant de l’opium (Trampoline), des basses jouissives rappelant le Norvégien Whitest Boy Alive (Stories of Numbers, Ann Wants to Dance), des airs jazzy (Chubby Baby) et même des échos de Pete Doherty, époque solo Grace / Wastelands (One Of Those Days). Il n’en fallait pas plus pour aiguiser notre curiosité et les rencontrer.
Papooz, c’est une histoire d’amitié ?
Ulysse : C’est ça, c’est une histoire d’amitié. A l’époque, Armand venait à une réunion qu’on organisait tous les mardis, dans le but de monter un journal littéraire et artistique. Finalement, on ne l’a jamais fait. On s’est vu régulièrement mais on n’était pas très amis au début. Et puis on a commencé à traîner ensemble et à faire des chansons.
Vous avez des goûts plutôt complémentaires ou similaires ?
Ulysse : On est plutôt complémentaires, après on n’a pas que des points en commun. Je me lève très tard et lui tôt… non je rigole (rires) ! A vrai dire, on est tous les deux du même signe astrologique, Taureau, donc on a quand même plein de points en commun. On a à peu près les mêmes goûts musicaux. C’est juste l’éducation qui diffère. On ne vient pas exactement du même milieu. En plus, Armand a un jumeau. Moi je suis l’aîné. Ça forge des caractères différents. Mais sur la musique, on est plutôt très vite d’accord.
Entre les auditions inRocKs Lab de 2013 et aujourd’hui, trois ans se sont écoulés. Il a fallu tout ce temps pour arriver à un album qui vous convienne ?
Ulysse : On a pris tout ce temps pour trouver la bonne manière d’enregistrer, pour que ça sonne cool, un peu comme on est en live. On a ainsi enregistré plusieurs fois la même chose, de différentes manières et dans différents studios. Voilà pourquoi ça a pris du temps, pour trouver cette « science » et pour tenter de comprendre ce qui nous correspondait sur l’enregistrement.
Où a été enregistré cet album, justement ?
Ulysse : On a fait une session avec tout le groupe dans le Sud de la France pendant presque un mois. Dans ma maison du Cap Ferret, au bord de l’eau et en plein hiver, on a installé notre home studio. On a enregistré en live tous les instruments pour garder la même énergie qu’on a justement en concert.
Armand : Même la voix est enregistrée en live avec les autres instruments. Par contre, on a fait beaucoup d’overdub : on a rajouté à posteriori des arrangements et d’autres instruments (violon, contrebasse, guitare), parfois même d’autres musiciens. On a donc complété avec des sessions enregistrées dans des studios à Paris.
Pourquoi avoir enregistré l’album en live et pas piste par piste ?
Ulysse : On avait déjà enregistré piste par piste des morceaux avec le groupe au Studio Saint Germain, mais ça sonnait trop propret, ça ressemblait moins à notre live. Donc on ne l’a jamais sorti. C’est pour ça que ça a pris un peu de temps. On voulait reproduire l’effet en live où l’on s’éclate sans forcément que ça soit surproduit.
Si on regarde les titres de l’album : « Dance », « Simply Baby », « Trampoline », « Good Times On Earth », « Green Juice », on se dit que Papooz est un pays plutôt heureux ?
Ulysse : Oui, mais il y a aussi des chansons tristes et mélancoliques. Après, c’est vrai qu’on est des garçons plutôt heureux et cool dans la vie. On n’aime pas la musique qui est trop négative, on préfère que ça soit facile à écouter, c’est dans notre nature, je pense.
On sent le soleil aussi sur votre disque…
Ulysse : Ce sont les cheveux d’Armand, on l’appelle « Petit Soleil » (rires). C’est la maison dans le Sud aussi. On a beaucoup traîné au Cap Ferret, on a une bande au bord de l’eau. Le groupe s’est construit là bas. Ce qui nous a quand même donné un esprit assez solaire, même si on est des gars de Paris, hormis le batteur et le bassiste qui viennent de là-bas.
Vous chantez tous les deux. Le timbre des voix est si léger qu’on a déjà dû vous demander s’il y avait une voix féminine ?
Ulysse : Armand a la voix la plus haute, la plus féminine. A vrai dire on a à peu près les mêmes tessitures de voix, mais la sienne est plus féminine. On nous le dit tout le temps…
Armand : Avant on chantait beaucoup à deux, à l’unisson. Et ça s’est vite transformé : celui qui écrit le titre, devient le lead vocal. Et on fait des harmonies derrière ce lead. Sur cet album, c’est comme ça qu’on a procédé.
Le clip de « Ann Wants To Dance » est signé Soko. D’où est née cette rencontre ?
Ulysse : On avait repéré une vidéo de Sacha, la petite copine de Soko de l’époque sur Instagram, en train d’écouter un super morceau et de mâcher son chewing-gum tout en faisant de la gym. Moi j’avais adoré ce truc. Par l’intermédiaire de notre manageur, on l’a contactée. Elle était à Rhodes, en Grèce, en train de tourner un film dans un hôtel, on est allé la rejoindre là-bas pendant ses trois jours de repos, et on a tourné ça. On s’est décidé une semaine à l’avance.
Comment s’est passé le tournage ?
Armand : Soko voulait une image DIY des année 80, donc on a pris une caméra Sony à cassettes. On est arrivé là-bas et elle ne marchait pas, les batteries étaient mortes. Heureusement, j’avais apporté une caméra de secours qui devait appartenir à mon père, un truc waterproof vraiment pourri : ça rendait un peu TF1, genre L’Ile de la Tentation. Donc on a tourné avec ça et après on a mis un filtre. Et comme on avait une batterie de merde, on devait s’arrêter souvent pour la recharger. On a fait le clip en deux après-midis.
Vous avez aussi repris « Simply Are » d’Arto Lindsay. Une reprise pour un premier album, c’est un peu gonflé ?
Armand : Maintenant c’est peut-être gonflé, mais si tu écoutes les premiers albums de Rolling Stones, par exemple, il n’y a pas une seule chanson qu’ils aient écrite. Idem pour les Beatles… Et puis, on adore Arto Lindsay, un artiste très décalé et étrange, et très bon compositeur…
Ulysse : On l’a fait un peu au dernier moment. Puis on se l’est réappropriée, c’est pas une pâle copie. On l’aimait tellement.
Vous savez si Arto Lindsay l’a écouté ?
Ulysse : Non, on a essayé de le contacter. Mais les nouvelles technologies, à priori, c’est pas encore son truc. (rires)
« Wanted », c’est la seule chanson de l’album sur laquelle vous avez invité une chanteuse, n’est-ce-pas ?
Armand : Oui, c’est ma petite copine. C’est elle qui signe aussi tout notre univers graphique, elle s’appelle Victoria Lafaurie. Elle avait écrit et composé une chanson, elle nous plaisait beaucoup, donc on a décidé de l’enregistrer.
Album « Green Juice » sur le label Half Awaye, disponible en digital (Itunes, Spotify, Deezer)
En concert : le 11 octobre à l’Alhambra (Paris)
Interview de Abigail Ainouz pour LesInrocks