Bonne année 2019 #Guggenheim ! En brisant le rythme orthogonal de la Cinquième Avenue, l’architecte Frank Lloyd Wright a réussi à faire du musée Guggenheim un des monuments les plus connus de New York. L’établissement célèbre cette année son 60ème anniversaire.
Frank Lloyd Wright n’assista pas à l’inauguration du Musée Solomon R. Guggenheim en octobre 1959. Sa mort, cinq mois plus tôt, fit de cette dernière œuvre une sorte de manifeste posthume et un pied de nez géant : l’architecte, adepte d’une parfaite symbiose entre ses constructions et leur environnement, avait dessiné, pour la sévère et classique Cinquième Avenue, un coquillage de marbre dont la couleur, la taille et le volume juraient avec tous les immeubles voisins. Dans cette « sculpture » moderne se trouvent concentrées nombre d’idées testées sur des villas tout au long de la carrière de Frank Lloyd Wright.
Une rampe en hélice pour colonne vertébrale
Le bâtiment est simplissime. A l’extérieur, il a l’aspect d’un cône renversé aux parois bombées, posé sur son socle comme un gros escargot de béton. Quatre grandes meurtrières horizontales en font le tour, annonçant l’architecture et la géométrie intérieures. Cette grande coquille est creuse, éclairée par un dôme de verre.
Un ascenseur conduit les visiteurs au sommet, et tous, pour redescendre, empruntent le même chemin. La fameuse rampe hélicoïdale de Frank Lloyd Wright, ici parfaitement aboutie, se déroule en pente douce jusqu’au rez-de-chaussée. Cette spirale, déjà testée par l’architecte au centre touristique de Sugar Loaf Mountain, un parc touristique du Maryland (1925), puis lors de la transformation du magasin Morris à San Francisco (1948), évoque une continuité spatiale autour de formes géométriques variables et la fluidité d’usage d’un bâtiment.
Au Guggenheim, les fameuses collections du magnat de l’argent et du cuivre sont accrochées dans les salles des 2ème et 4ème niveaux, alors que la place réservée aux expositions permanentes traduit toute la modernité du lieu : elles occupent les 400 mètres de mur bordant la rampe et le vide central visible au-dessus des balustrades. C’est à une artiste allemande réfugiée aux Etats-Unis que Frank Lloyd Wright doit cette fabuleuse commande : Hilla Rebay. Elle conseille Salomon R. Guggenheim et gère ses achats depuis les années trente. Elle choisit l’architecte pour ses théories sur les constructions organiques et son goût des volumes ouverts.
Le projet survit à ses instigateurs
La mort de Solomon R. Guggenheim, l’industriel amoureux de Mondrian et de Kandinsky, en 1949, va mettre en péril le projet pourtant accepté à l’état de maquette depuis 1946. Hilla Rebay est remerciée par le nouveau directoire. Il est trop tard pour renoncer, mais le chantier restera bloqué jusqu’en 1955. Frank Lloyd Wright a 86 ans lorsque les travaux reprennent.
Les principes essentiels de son musée sont conservés, mais des « détails » chers à l’architecte, et significatifs de sa démarche, sont tout bonnement supprimés. Faute d’argent ou d’audace, les nouveaux maîtres d’ouvrage décident de remplacer par de la peinture le placage de marbre poli des murs extérieurs qui devait évoquer la pureté du coquillage.
Le nom de « musée d’art non objectif » est remplacé par celui, plus neutre, du généreux mécène. Frank Lloyd Wright meurt sans avoir achevé son « Panthéon », comme il l’avait baptisé. La forme de ziggourat du musée devait évoquer, telle une tour de Babel, le mélange des arts et des cultures. La fin de l’histoire lui aurait prouvé que cet espace refermé sur lui-même et « protégé de l’absurdité de la métropole américaine » avait bien sa place au milieu des gratte-ciel et de la nouvelle Babylone en perdition.
Happy New Year from the #Guggenheim! In 1959 the museum opened its doors and became a striking addition to New York City’s architecture. Thank you for helping us make the last 60 years of radical art and architecture so unforgettable—here's to the next 60. #Guggenheim60 pic.twitter.com/h7igv3nmUn
— Guggenheim New York (@Guggenheim) January 1, 2019