Les médias américains regorgent de faits divers de ce genre : des flics blancs à la gâchette facile qui se prennent pour des cow-boys, des jeunes noirs à la dégaine de dealer et de gang rappeur. Une mauvaise rencontre, et ça vire au cauchemar. D’un côté un connard de flic, de l’autre un délinquant qui l’a bien cherché. Nos jugements à l’emporte pièce sont vite posés.
C’est pour rompre avec cela que le réalisateur Ryan Coogler a voulu donner un nom, un visage et une vie, au jeune de 22 ans abattu ce soir-là devant ses copains. Pour rien… En 2008, Ryan a le même âge que la victime, se rendait à la même soirée de réveillon de Nouvel An, pour voir le même feu d’artifice dans la Baie de San Francisco.
Il est presque minuit. Oscar Grant prend le métro avec ses amis et sa petite amie. Il est l’heureux papa d’une petite fille de quatre ans qui l’adore. Comme d’ailleurs sa mère, sa sœur, sa grand-mère, ou ses collègues de travail à la boucherie d’un supermarché.
Flash-back : on vit avec Oscar sa journée du 31 décembre 2008. Le rythme est lent et sobre, sans effet de manche. Nous passons la journée avec Oscar, et c’est exactement ce que voulait le réalisateur : que nous passions du temps avec Oscar pour apprendre à le connaître. Jusqu’à l’enchaînement fatal. On sort de là en se disant « quel gâchis ! », « quelle tristesse ! ». On pense à sa famille, à sa mère Wanda, à ses amis, à sa femme et sa fille, réunis à l’hôpital dans une scène incroyable de dignité.
Qu’en aurait-il été sans les preuves filmées par les portables de toutes les personnes présentes sur le quai ? Car malgré cela, deux ans, avec une sortie de prison au bout de onze mois, c’est bien peu de chose.
Fruitvale Station Grand Prix du Jury et du Public au Festival de Sundance 2013.