J’ai pris une claque ! Une grosse claque, en lisant l’histoire de la vie de Yeonmi, nord-coréenne née en 1994, dans le nord du pays où l’électricité n’est disponible qu’occasionnellement et où les enfants font des heures de queue pour un peu d’eau. Un pays où toute la vie est gérée par le grand Kim Jung Il, qui choisit le conjoint, les études, le métier, et où la délation est reine. Un pays où la nuit est noire et le jour silencieux car il n’y a pas d’avion, peu d’usines et de voitures… Yeonmi nait en pleine période de famine, elle a une sœur, des parents aimants et mène sa vie de petite fille dans la crainte d’avoir de mauvaises pensées que Kim Jung Il pourrait, à coup sûr, lire en elle.
La fuite de la sœur de Yeonmi en Chine précipite la sienne ainsi que celle de sa mère en 2007, la traversée de la rivière séparant la Corée de la Chine, et soudain le début des drames, le piège du trafic d’êtres humains, les mariages forcés avec des chinois âgés ou handicapés en panne d’épouse chinoise. Suivent les années en Chine entre petits bonheurs et gros drames, la vie de clandestins sans papiers. Puis les Jeux Olympiques arrivant, et le besoin de donner une meilleure image, les contrôles de plus en plus fréquents, la clandestinité et la peur permanente d’être renvoyée en Corée du nord. Yeonmi a 14 ans et elle a déjà vécu plus de choses affreuses que la plupart des gens dans une vie entière. Puis, enfin une main tendue, celle de missionnaires chrétiens de Qingdao, qui vont initier Yeonmi et sa mère a un nouveau dieu. Pour les deux femmes, louer Kim Jong Il ou un autre ne fait pas de grande différence, et Yeonmi se met à croire.
Là, la fuite vers la Corée du Sud s’organise. Il faudra traverser le désert de Gobi de nuit, en plein hiver, par moins 30°, jusqu’à la frontière de la Mongolie. Une épreuve de plus. Un nouveau camp de rassemblement. Les interrogatoires du personnel de l’ambassade de Seoul qui espère faire le tri entre les transfuges et les espions, et enfin la Corée du sud, mais pas la liberté. Comment peut-on lâcher, dans la nature des gens qui n’ont aucune connaissance du monde moderne, les distributeurs de billets, les centres commerciaux… Quand un « formateur » lui demande quelle est sa couleur préférée, elle répond : « que faut-il répondre ? ». Durant cette période, le plus grand défi de Yeonmi fut d’apprendre à penser par elle-même… Cela peut paraître tellement incroyable ! Après une période d’intégration difficile, Yeomi s’est lancée à corps perdu dans les études, s’est fait sa place dans le monde moderne, donne des conférences sur son pays, son expérience, et est désormais sous surveillance permanente des services de renseignements nord coréens.
Un témoignage rare, captivant et édifiant à dévorer d’urgence.